Atelier d'initiation février 2013
BRAVO LES DEBUTANTES !
A la façon de Georges Perrec,
Emilie pour son tout premier atelier d’écriture nous confie sa liste de souvenirs :
Je me souviens, de la bonne odeur du pâté de mamie qui n'avait pas fini sa cuisson
Je me souviens de l'excitation, les matins de départ en vacances
Je me souviens de mes yeux qui piquent devant le huitième jour
Je me souviens de l'odeur de cire, le dernier jour d'école
Je me souviens de mon coeur qui palpite un soir d'orage
Je me souviens des belles chansons d'été pendant les vacances
Je me souviens du mal de ventre les jours de contrôle de maths
Je me souviens du club Dorothée
Et trois textes très « forts » en sensations, oeuvre de Corinne
Alerte
Bombe
Cris
Débandade
Et
Forcément
Gigantesque
Horreur
Il
Jure
Kandahar
Lointain
Mystérieuse
Nuit
Oppressante
Partir
Quitter
Respirer
Soupirer
Trembler
Ultime
Vengeance
Waouh !!
X
Y
Z
Inspiré par une photo de Benoit Teillet :
Un matin, j'ai poussé la porte rouge de la Gargotte de Charlotte : 3 petites fenêtres alignées trop hautes pour pouvoir voir ce qui se passait derrière cette porte. Derrière, des bruits de verre qui s'entrechoquent, des rires, des cris.
Allez, j'y vais: je jette un coup d'oeil, un premier homme, mafflu et rougeaud entonne un chant irlandais entre deux gorgées de bière, un second qui semble vélétudinaire vide un verre de gloria, qui dégage une forte odeur d'eau de vie de prune, le troisième somnole déjà, la tête penchée sur la toile cirée collante.
Derrière le bar, Charlotte a la tête des mauvais jours : toute la matinée, elle s'est affairée à préparer pour ses invités irlandais une panse de brebis farcie aux myrtilles qu'elle est allée ramasser au peigne en fin d'été, en Auvergne où habite la grand-mère de Léontine.
Elle a longtemps hésité entre une belle nappe en lin et la toile cirée et les voilà maintenant qui renversent leur breuvage en cognant leurs verres l'un contre l'autre et en hurlant
Elle va devoir frotter sa toile avec de la lessive St Marc !! C'est la St Patrick qu'ils fêtent aujourd'hui et la victoire du quinze irlandais face à l'équipe de France : sur leurs épaules, des écharpes blanc et vert comme l'espoir de leur mettre une plumée.
Charlotte, elle, elle n'en peux plus : pour elle, l'Irlande, c'étaient des bandes désertes et silencieuses à perte de vue comme dans "Les hauts de Hurlevent", des ballades romantiques au violon .... Elle a l'air trop triste, Charlotte, je referme la porte en lui faisant un petit signe . Je continue mon chemin, je pousserai une autre porte .....
Scripto-clip
Quand l'énergumène est entré dans la pièce, j'ai tout de suite compris qu'un drame allait avoir lieu : il avait le regard glauque, un rictus sur les lèvres, ses oreilles décollées attiraient le regard comme lorsque j'avais vu mon premier perroquet lors d'un voyage fantastique une nuit d'insomnie. Ses couleurs vives comme celles du slip de mon dernier amant m'avaient entraînée dan un délire visuel, un kaléidoscope dont j'avais du mal à m'extraire. Tous mes sens se mirent alors en éveil, sur ma langue, je sentais le goût de la bergamote de Nancy, cette ville que j'avais connue sous la neige un fameux jour de décembre quand je m'étais trompée de train à la Gare de l'Est. Et quand il s'est déshabillé, c'est le toucher qui s'est alors mis en éveil : son corps, à la différence de son visage appelait mes mains à le toucher, je m'imaginais allongée dans un champ de pissenlits au printemps, mais quand il m'a repoussée, j'ai alors eu envie de l'étrangler. Mes mains se sont accrochées à son cou, son regard glauque essayait de m'attendrir, mais rien n'y faisait, il fallait que je termine ce que j'avais commencé. Rien n'y faisait, ni ses larmes, ni son regard implorant, mes mains serraient toujours plus fort. Je l'emmenais vers le fond, comme on de laisse descendre au fond d'une piscine, pour essayer d'oublier mon geste. Je me sentais joyeusement revivre, redevenir moi-même, je quittai le champ l'esprit libre, sans remords ni regret, prête à une nouvelle aventure. Sur mes lèvres, un sourire fugace....
Et Clara, l'une de nos deux benjamines fait preuve de beaucoup de talent dans un scripto-clip original :
« La casa »
J'hésitai à entrer dans ce magasin. Il me semblait un peu étroit et une femme sortait toutes les demi-heures pour fumer une cigarette. J'étais assise sur un banc, mon portable dans les mains quand, tout d'un coup, je suivis cette femme à l'intérieur de ce magasin nommé « la casa »
L'intérieur était d'une tapisserie bleue avec des poissons. Je voyais bien que les personnes de ce magasin voulaient faire quelque chose de joli mais le résultat était plutôt kitch ! Je me serais crue dans « Némo ». Ce magasin était un magasin bazar ( pour être un bazar, il y était !) : toutes sortes de choses : des chips, du parfum, du liquide vaisselle Javel, des habits en velours.... Tout, il y avait vraiment de tout ! Je me laissai guider par mes pieds,qui, finalement m'emmenèrent vers les parfums. Je fis quelques « pchitt » sur mon poignet puis sentis. Toutes ces odeurs de rose, de pamplemousse ou d'hortensia me firent remonter des souvenirs très lointains.....
La femme qui sortait dehors régulièrement vint vers moi et me dit d'un air joyeux : « hola! Bienvenue à la Casa, vous cherchez quelque chose ? » me dit-elle d'un petit accent
« Oui, je cherche un pull bleu » lui dis-je. Bien sûr, je n'avais pas du tout l'intention de l'acheter mais je voyais que juste ma présence lui faisait plaisir. Elle me montra un pull bleu, mais pas le bleu que j'aime. Je lui dis : « n'auriez vous pas plutôt un bleu ciel, je préfère » . Elle voulut commencer une phrase mais ne put la terminer car derrière un rideau, une petite clochette retentit. La femme fut brutalement prise d'une crise d'angoisse et elle s’évanouit. Je ne sus jamais ce que cette cloche représentait pour cette femme mais elle la terrifiait plus que tout ! Quand elle reprit ses esprits, je lui demandai ce que cette cloche représentait et fus très surprise par sa réponse. Je lui achetai un petit pull bleu couleur ciel. Quand je sortis de ce magasin, j'étais ailleurs, dans les nuages....
Aujourd'hui, je suis assise sur ce banc, en face de moi, le magasin « la casa »
J'ai un pull bleu sur moi et je repense à cette femme phobique du téléphone....